Malim est tout d’abord déroutant.
L’auteur passe du récit de l’annonce de l’attentat qui a emporté son frère une veille de Noël à la description des clans politiques du Soudan et des États voisins, des souvenirs d’enfance au droit international, du fonctionnement d’une mission humanitaire à une pièce de théâtre sur la guerre, du discours de l’administration aux poèmes de Jean-Paul, etc.
Mais très vite, on comprend que le livre est construit comme un réseau hydrographique : chaque flux d’information, qu’il provienne des membres de MSF, des autorités françaises et internationales, de la famille, de la documentation disponible ou d’autres associations, se déverse dans un autre flux qu’il alimente avant de se connecter à un troisième. Ce réseau donne, au fil du livre, une cohésion à tout un territoire d’enquête jusqu’à la compréhension de ce qui s’est passé ce jour de décembre 1989. Compréhension, donc, mais aussi, et surtout, comme le précise Joël, soulagement d’avoir fait ce qui pouvait et devait être fait pour ne plus porter seul la responsabilité de dire « on ne peut rien faire », une réponse trop entendue.
Malim est impressionnant quand on voit restituées ainsi, avec précision et persévérance, vingt-cinq années de quête extérieure et intérieure que Joël a consacrée à la mémoire de son frère disparu.
Une écriture exemplaire, sincère, authentique dans le témoignage.
Un livre émouvant pour toutes les victimes d’attentat, une leçon d’investigation pour plus d’un journaliste, une parole libre adressée aux politiques.

1 réponse
  1. Joel Bescond
    Joel Bescond dit :

    Merci Marie-Anne pour ce billet.
    Je retiens la construction du livre en « reseau hydrographique », qui rappelle le Sudd, l’entrelacs des rivières de la cuvette du Haut-Nil, territoire de mon enquête, au-delà du Sahel, l’autre côté du miroir des politiques français, depuis Fachoda.

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