Bienvenue sur le site Carnet de mémoire Histoire d’Afrique en hommage à mon frère le docteur Jean-Paul Bescond, tué le 21 décembre 1989 au Soudan. L’avion d’Aviation sans frontières qui assurait la liaison entre les missions de Médecins sans frontières était abattu par un missile.  Je tiens à rendre hommage également, par ce site, à Yvon Felliot, Laurent Fernet et Frazer Alyemda, qui ont tous les trois trouvé la mort avec mon frère dans cet attentat.

Ce jour-là, Jean-Paul quitte Aweil, au Soudan, pour rejoindre la capitale, Khartoum. Arrivé le 30 octobre dans cette ville de garnison de la province du Bahr el Ghazal exposée à la pression de la rébellion de John Garang, il a passé près de deux mois à l’hôpital d’Aweil, aux côtés du docteur Samuel et du personnel.

Le Britten Norman d’ASF qui l’emporte est piloté par Yvon Felliot. Ancien pilote de voltige aérienne, Yvon est instructeur à l’aéroclub de Sarlat, en Dordogne. Il a rejoint ASF en 1986 et s’est porté volontaire pour le Soudan en 1989. Yvon a ouvert la mission soudanaise des pilotes d’ASF en avril. Il connaît bien les équipes de MSF, les pistes des villes du sud où se trouvent les missions, Yei, Maridi, Yambio, Tambora, Juba, la boucle du sud, qui passe parfois par El Obbeïd en remontant sur Khartoum. Ce vol clôture sa troisième période de deux mois au Soudan et Yvon rentrera en France passer les fêtes de fin d’année en famille.

  • F-OGSM avec Yvon

  • Au pied de F-OGSM

  • A Aweil

    A Aweil

La procédure est toujours la même au décollage : on prend de l’altitude en décrivant des cercles au-dessus de la piste, à l’intérieur du puits d’ascension, sous la protection des forces gouvernementales et après avoir eu confirmation de l’autorisation de vol par les autorités de la ville et, à la radio, des rebelles. Les six mois d’accalmie ont permis depuis avril le déploiement de l’Operation Lifeline Sudan, et depuis octobre, les combats ont repris entre l’armée gouvernementale et la rébellion. Les premières victimes du conflit civil sont les Dinka, habitants de cette région de la cuvette du haut Nil, réputés être le vivier des combattants en lutte contre l’armée régulière de Khartoum. La population affamée, affaiblie, terrorisée, malade, fuit les combats et cherche refuge dans les villes. Le tissu social soudanais est en lambeaux, déchiré entre les ethnies, les appartenances religieuses, les oppositions politiques, les forces armées régulières et les rebelles.

Jean-Paul Bescond

Jean-Paul a très bien compris la situation. Il a apporté toutes ses compétences de médecin pour soigner au mieux la population civile à l’hôpital. Il en a fait un rapport. Un très bon rapport selon l’équipe qui reste à Aweil.

Catherine C, Catherine K et Éric poursuivront l’action d’assistance qu’assure Médecins sans frontières à l’hôpital d’Aweil. Ils l’accompagnent au pied de l’avion. Jean-Paul est serein, habité par ce sentiment d’avoir accompli sa mission honorablement. Le travail qu’il a accompli à Aweil est arrivé à son terme. Il pense déjà à sa future mission. Il rejoint Khartoum pour ensuite s’envoler pour l’Éthiopie, où une nouvelle évaluation l’attend. Il prend place à côté d’Yvon.

Laurent Fernet, logisticien MSF de Khartoum pour toutes les missions soudanaises, et Frazer Alyemda, fonctionnaire onusien soudanais du PAM montent également à bord. Trois passagers dans cet avion prévu pour neuf, ils seront à leur aise.

Le décollage n’a rien d’inhabituel et le Britten Norman effectue un premier tour d’ascension au-dessus de la piste. Le missile qui abat l’avion lors de ce premier passage à la verticale de l’équipe de MSF restée au sol est tiré d’un point non loin de la piste, derrière le bureau de la sécurité.

Il me faudra 25 ans pour comprendre la face cachée de cet attentat et cinq années d’écriture pour en faire le récit. Ce site est l’aboutissement de ce parcours de 30 ans. Vous y trouverez des extraits du récit, Malim Une histoire française, qui reprend, non seulement le parcours de ma famille, mais aussi le rôle de la France en Afrique au tournant des années 1980-90, les discours officiels et la diplomatie parallèle, les relations du Tchad, de la Lybie et du Soudan avec la France, les États-Unis, l’ONU et l’OUA. Vous trouverez également des documents concernant cet attentat et quelques articles d’actualité .

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