La duplicité de Mitterrand, formée d’un mélange d’opportunisme et de rapports ambigus à la réalité, est aujourd’hui bien documentée. Son ami Roland Dumas la présente comme sa qualité première, révélatrice de sa personnalité. Le président aimait prendre le manteau de la sincérité pour finalement laisser aller les choses et noyer le poisson, en dépit de toutes les promesses électorales. « On faisait comme si on allait changer, mais on savait qu’on ne changerait rien » se souvient Roland Dumas dans son livre Dans l’œil du minotaure.

De Vichy à l’Algérie, des ministères de la IVe République à l’attentat de l’Observatoire, Mitterrand n’a eu de cesse de jouer l’improbable pour s’assurer la victoire. L’alliance de 1981 avec les communistes, pour les étouffer, l’abolition de la peine de mort, pour faire valoir une image de partisan de la concorde républicaine et faire oublier l’amnistie des généraux putschistes d’Alger de 1961, la construction européenne, pour avoir les mains libres en Afrique, procèdent du même état d’esprit.

Se proclamer défenseur des droits de l’Homme et dénoncer les crimes contre l’humanité écarte tout soupçon de calcul. En cas de danger, le rappel des grands principes est la meilleur défense. Au besoin, quelques traits d’esprit, disqualifiant l’adversaire, sont servis à tous les amateurs. Et ils sont si nombreux. Le champ des manœuvres est alors ouvert. Les procédés sont sous le couvert de l’ambiguïté où l’équivoque est le meilleur camouflage.

Mitterrand, au cours de ses 14 années de règne n’aura de cesse de parfaire la méthode. Il avait pour cela tous les atouts que lui conféraient les institutions de la Ve République.