L’attentat du DC 10, au cœur du #ProcesSarkozy2025, convoque l’examen des relations France-Libye en 1988-89.

Le 25 avril 1988, Kadhafi annonce aux ambassadeurs accrédités en Libye son intention de faire un « cadeau » à l’Afrique : une série de mesures pour normaliser ses rapports avec le Tchad.

Les élections françaises augurent d’une reprise de relations avec la France, après la cohabitation, faites de « diplomatie parallèle », recherche de « troisième homme » et négociations bilatérales tchado-libyennes sur Aozou.

Le 25 mai, à Addis Abeba, l’annonce est accueillie favorablement à l’OUA. Hissène Habré est le seul chef d’Etat à souligner ses incohérences : Kadhafi ne se présente pas aux réunions du comité ad hoc sur Aozou, en dépit de sa déclaration, et élude la question territoriale. La contradiction est évidente. Paris se déclare satisfait et Hissène Habré, contraint de faire bonne figure, accepte le cadeau piégé. Mais la menace contre son régime est réelle : sur le terrain, Kadhafi viole de façon répétée le cessez-le-feu de 1987. Habré est déterminé à lutter contre toute tentative de déstabilisation, prêt à traquer tous dangers, surtout au Darfour, où la rébellion des Hadjeraï, CDR et autres groupes armés reçoit l’appui de Tripoli.

En octobre, des tractations aboutissent, malgré les combats au Darfour, au rétablissement des relations diplomatiques entre les deux pays, sans avancer sur le différend territorial. Début décembre, les affrontements se portent sur le sol tchadien. Mais le 18 Mitterrand annonce l’allègement d’Epervier. Début 1989, les combats au Darfour se multiplient dans une atmosphère de confusion croissante.

Le Soudan sombre dans l’instabilité politique. A Khartoum, des officiers exigent, fin février, « une politique étrangère équilibrée », provoquant la démission du gouvernement. Le nouveau cabinet formé le 27 mars vise l’abrogation de l’accord militaire avec Tripoli et précipite les évènements au Tchad. Le 1er avril Déby rejoint l’opposition armée au Darfour. Pour le rebelle tchadien, le programme soudanais est un virage à 180 degrés. Pour Kadhafi aussi. Abroger l’accord compromet son accès au Darfour et la sécurité des bases arrière de la rébellion tchadienne. Cet accord ne peut être abrogé.

Le 1er juillet, Sadek el Mahdi doit se rendre en Libye pour finaliser l’abrogation. Le coup d’Etat de Bechir, le 30 juin, préservera l’accord. Désormais, la « diplomatie parallèle » de Mitterrand se passera de Kadhafi pour assurer la sécurité des bases arrière de Déby et le compromis d’Alger sera signé le 31 août.

Le recours à la CIJ sort le règlement du différend territorial du champ d’une négociation bilatérale arbitrée par un Etat tiers. Kadhafi sait que son dossier d’Aozou ne passera pas à la CIJ. Il ne le signera pas. Le signataire sera le ministre des Affaires étrangères, Djadallah Azzouz. Le compromis engagera la Libye mais Kadhafi règlera ses comptes de la « diplomatie parallèle » 19 jours plus tard au-dessus du Ténéré.