« Avignon nous a donné une visibilité et nous avons pris des contacts pour rejouer à Lyon, en novembre, au théâtre de l’Intervalle. J’envoie également le dossier du spectacle avec les articles de presse aux théâtres que je connais et à ceux qui, me semble-t-il, pourraient être intéressés. La personne du Mouvement de la paix que j’ai rencontrée à Avignon et que je n’ai pas revue pourrait peut-être venir à l’une des représentations de novembre à Lyon ?

Sachant qu’elle est de l’Isère, je cherche ses coordonnées sur internet. Lors de mes recherches, je vois qu’il existe d’autres associations qui pourraient éventuellement être intéressées et auxquelles je pourrais m’adresser. Je retiens l’Association française des victimes du terrorisme.

L’AfVT vient d’être créée en 2009 par Guillaume Denoix de Saint Marc et l’association des familles du DC10 d’UTA. Je prends contact avec cette association au début du mois de novembre par un mail dans lequel je me présente en relatant brièvement l’attentat et la plainte déposée l’année précédente :

« Nous pourrions peut-être échanger à propos du terrorisme et de la suite que l’on peut donner à la plainte que ma famille et moi-même avons déposée. Le sens de cette plainte est surtout de ne plus avoir à porter nous-mêmes la responsabilité de dire « on ne peut rien faire ». C’est-à-dire que si vraiment « on ne peut rien faire », ce n’est pas à nous, famille de victime, de porter la responsabilité de le dire.

Par ailleurs, pour commémorer le vingtième anniversaire de la disparition de mon frère, je joue au théâtre le texte d’Adel Hakim Exécuteur 14. Cette pièce a été jouée, par moi-même, à Avignon cette année.

Je vous joins le dossier du spectacle ainsi que l’annonce des représentations, cette semaine à Lyon. »

J’envoie également l’annonce du spectacle à tous mes contacts et nous jouons au théâtre de l’Intervalle du 10 au 14 novembre. Le public n’est pas aussi nombreux que nous l’espérions, malgré les témoignages précieux du livre d’or.

« Un texte fort avec des mots durs comme des balles. Un texte interprété magistralement par deux comédiens fortement investis dans leur rôle. Un spectacle à voir et à revoir. »

« Magnifique travail. Très fort. Texte de fond magnifiquement écrit. Richesse de la mise en scène. Performance des acteurs. Couple au parfait diapason. Universalité du propos. Grand merci. Accrochez-vous pour le diffuser. L’humanité en a besoin. Merci. »

Au retour de Lyon, je reçois de notre avocat l’avis à partie civile datée du 16 novembre nous informant que la plainte est bien enregistrée. Le juge pourra désormais commencer à travailler. Puis au début du mois de décembre 2010, je rencontre Guillaume Denoix de Saint Marc. C’est la première fois que je rencontre quelqu’un ayant vécu quelque chose de comparable à ce que ma famille et moi-même avons vécu. C’est un sentiment singulier. Nous parlons de son parcours et du mien, de la place de la victime du terrorisme dans la société. Guillaume me dit qu’il est important de parler librement de ces questions, que le terrorisme fait partie des questions de société et que c’est à nous, victimes du terrorisme, de prendre notre place dans la société. Il me donne le livre qu’il a écrit sur les démarches, les investigations, ce long combat qu’il mena avec les familles des victimes du DC10 et le mur des autorités françaises auquel ils se heurtaient après l’attentat[1].

L’action que je poursuis à travers la diffusion de notre interprétation du texte d’Adel Hakim n’est pas de celles que se propose de mener l’AfVT. L’action de l’association vise alors à se porter partie civile dans les procès initiés par ses adhérents afin de donner plus de poids aux procédures judiciaires. Ce travail est un gros travail. Le code de procédure pénal régissant la constitution de partie civile pour une personne morale doit être modifié et l’action de l’AfVT doit être en premier lieu d’obtenir la modification de la loi[2]. Guillaume me précise que c’est à chaque adhérent de suivre son dossier, que l’AfVT ne peut se substituer à chacun dans ce suivi et me propose néanmoins de partager les informations sur les investigations. J’adhère à l’association et un article relatant l’attentat est rédigé sur le site. Il précise :  « Le frère de la victime, Joël Bescond, est en relation avec l’AfVT pour le suivi de son action judiciaire. » »


[1] Mon Père était dans le DC 10. Edition privé. 2006.

[2] En 2010, une personne morale pouvait se constituer partie civile si elle pouvait justifier de cinq ans d’existence à la date des faits. La modification de la loi sera obtenue en 2012 avec la suppression de la mention à la date des faits.